Construisons ensemble un backlog produit en une demi-journée

Illustration de l'atelier construisons un backlog produit en une demi-journée
Ateliers / Evénements / Retour d'expérience

Construisons ensemble un backlog produit en une demi-journée

Dans cet article nous vous présentons un atelier s’étalant sur une demi-journée pour démarrer la construction d’un nouveau produit sur de bonnes bases et avec Scrum.

Nous l’avons conçu et animé à l’occasion de Frug’Agile France 2020.

Le principe de cet atelier est de construire en une demi-journée un backlog produit – au sens Scrum – ainsi que le ou les premiers sprints.

Pour cela, l’atelier se déroule en 4 phases successives :

  • Définition d’une vision produit. Cet élément n’est pas très mis en avant dans le Scrum Guide, mais il est pourtant essentiel à une bonne application de Scrum.
  • Construction d’un premier backlog produit via un User Story Mapping
  • Une estimation agile et un premier affinage du backlog produit via un Extreme Quotation.
  • La définition du ou des premiers sprints avec notamment un focus très important sur la notion d’objectif de sprint, qui fait écho à la fois à la vision produit et à la définition d’incréments qui ont individuellement de la valeur.

La définition du produit est le fil rouge de la soirée. Chaque phase produit un livrable qui sert de base à la phase suivante.

L’atelier sert les buts suivants :

  • Prendre conscience que l’élément le plus critique de Scrum est la vision produit, et l’objectif de sprint, sa déclinaison à l’échelle d’un seul sprint
  • Savoir que la construction du backlog produit demande un réel effort, mais qu’il n’est pas utile pour autant de réserver des semaines en amont du premier sprint pour avoir un bon backlog produit
  • Sentir l’apport de la collaboration et des échanges entre profils différents pour construire la vision produit et le backlog produit
  • Découvrir quelques outils classiques pour animer une équipe agile : Product Vision Board, User Story Mapping, Extreme Quotation

L’atelier se décompose en deux parties de deux heures chacune, avec une pause entre les deux.

La première partie permet de poser le décor. Elle se compose de la définition de la vision produit et du User Story Mapping :

  • 5 minutes | Ouverture : présentation, règles générales pour toute la durée de l’atelier
  • 35+5 minutes | Vision Produit : les règles du jeu, déroulé en petites équipes, 5 minutes de débrief collectif
  • 60+10 minutes | User Story Mapping : les règles du jeu, déroulé en petites équipes, 10 minutes de débrief collectif
  • 5 minutes | Pause : annonce de la pause, programme de la seconde partie

La seconde partie rentre plus dans les détails. Elle se compose de l’Extreme Quotation, de la définition du ou des premiers sprints et en particulier de leurs objectifs de sprint, ainsi que d’un moment narratif pour illustrer la suite des événements :

  • 5 minutes | Réouverture : rappel des règles générales pour toute la durée de l’atelier
  • 25+5 minutes | Extreme Quotation : les règles du jeu, déroulé en petites équipes, 5 minutes de débrief collectif
  • 60+10 minutes | Découpage et sprints : les règles du jeu, déroulé en petites équipes, 10 minutes de débrief collectif
  • 10 minutes | Et après ? Mise en scène narrative
  • 5 minutes | Clôture

Dans cette première phase, les participants doivent définir le produit fictif qu’ils allaient construire toute la soirée.

Pour aider les discussions à converger, nous donnons un cadre : le produit doit être une application de rencontre. Charge ensuite aux participants de trouver en quoi leur produit sera unique.

Le livrable de cet atelier est un Product Vision Board de Roman Pichler. (liens en fin de l’article)

Ce canevas simple mais complet oblige à se poser les questions principales autour du produit fictif :

  • Quel est son objectif ?
  • À qui s’adresse-t-il ?
  • Quel problème résout-il ?
  • Quel forme prend-t-il ?
  • Comment rapporte-t-il de l’argent ?

Il est primordial de bien répondre à ces questions pour le bon déroulement de l’atelier. Le groupe y reviendra par la suite lorsque des questions difficiles se présenteront, telles que :

  • Quel parcours utilisateur veut-on faciliter en priorité ?
  • Quelles sont les plus grosses hypothèses sur la réussite de notre produit et comment peut-on les tester au plus vite ?
  • En quels objectifs intermédiaires découpe-t-on cette vision pour la rendre atteignable ? Quel objectif de sprint définir ?

Un groupe qui n’aura pas réussi à bien définir sa vision produit n’aura pas de ligne directrice dans la suite de l’atelier et peinera à répondre aux questions difficiles.

Scrum Life sur la vision produit — https://www.youtube.com/watch?v=5gOxSjWiVPc

Dans cette deuxième phase, les participants doivent construire une première ébauche de backlog produit à partir de la vision produit qu’ils ont défini lors de la première phase.

Le livrable de cet atelier est un User Story Mapping tel que défini par Jeff Patton. (liens en fin de l’article)

Si vous n’êtes pas déjà familier avec l’exercice de User Story Mapping nous vous invitons à voir cet épisode de Scrum Life qui le présente et donne des conseils pour l’animer :

Scrum Life sur le User Story Mappinghttps://youtu.be/dvnU_R0mu98

Dans le cadre de cet atelier, il n’est pas nécessaire de faire un découpage du User Story Mapping en différent jalons. En effet, le reste de l’atelier permettra d’introduire les notions d’estimation et de sprints. Nous utilisons donc ici le User Story Mapping pour structurer le parcours utilisateur et aider à se projeter sur l’expérience.

Dans cette troisième phase, les participants estiment les éléments de leur ébauche de backlog produit qu’ils ont construite lors de la deuxième phase.

Le livrable de cet atelier reste le User Story Mapping mais augmenté par ces estimations.

Pour animer cette phase d’estimation, les participants procèdent à une séance de Extreme Quotation. Dans cette version, nous estimons en tailles de t-shirt : S, M, L, XL et XXL.

Si vous n’êtes pas déjà familier avec l’exercice de Extreme Quotation nous vous invitons à voir cet épisode de Scrum Life qui le présente et donne des conseils pour l’animer :

Scrum Life sur le Extreme Quotation — https://youtu.be/3kzJARYetFU

Rappelez-vous que l’Extreme Quotation propose d’estimer en se basant sur l’effort de test nécessaire. Ce critère permet d’inclure naturellement tous les participants sans trop rentrer dans les considérations techniques.

Pour fluidifier l’activité il est également important de commencer par mettre l’élément le plus petit en taille S et le plus gros en taille XXL. Les autres éléments sont alors placés de manière relative entre eux.

Dans cette quatrième et dernière phase, les participants reprennent leur User Story Mapping conçu lors des phases précédentes pour constituer le contenu du premier sprint du développement de leur produit et en particulier son objectif de sprint.

Le livrable de cet atelier est l’objectif du premier sprint ainsi que son backlog de sprint contenant les éléments du backlog produit. Si les participants ont suffisamment de temps, ils font de même pour les sprints suivants, toujours en partant de la vision produit et en définissant l’objectif de sprint.

Afin de contraindre les participants à faire des choix et à procéder à un découpage, nous leur imposons que le contenu de chaque sprint ne contienne :

  • Aucun élément de taille supérieure à M, et
  • Pas plus de 5 éléments de taille M, 2 éléments de taille S étant considérés comme équivalents à 1 élément de taille M.

Si vous n’êtes pas déjà familier avec l’exercice de définition des objectifs de sprint nous vous invitons à voir ces épisodes de Scrum Life qui le présentent et donnent des conseils pour le définir :

Plutôt que de se concentrer en premier lieu sur les éléments du backlog produit, il faut se focaliser sur les objectifs de sprint en gardant toujours en tête la vision produit. Prenons l’analogie de l’escalier : considérons que la vision produit est ce qui est tout en haut de l’escalier, c’est le but que l’on se donne. Chaque objectif de sprint sera une marche de cet escalier. Les éléments du backlog produit viendront ensuite très naturellement une fois les objectifs définis.

Il est également très puissant de parler d’apprentissage plutôt que de livraison. Chaque sprint Scrum est un cadre permettant d’apprendre sur ses utilisateurs et sur le marché. Dès lors, comment faire en sorte pour que chaque sprint nous permette d’apprendre quelque chose d’essentiel sur le produit ? Et d’ainsi pouvoir ajuster la direction du produit lors du sprint suivant.

Voici le document que nous avons utilisé.

Quelques notes :

  • De nombreuses slides ne sont pas affichées. Elles sont à destination de l’équipe d’animation. On y trouve des consignes, des conseils et des outils. En mode présentation, seules les diapos à partager publiquement avec les participants sont affichées.
  • Ce support d’animation a été conçu spécifiquement pour l’événement Frug’Agile France 2020. Bien sûr, si vous le jouez ailleurs, il faudra ajuster les éléments de contexte, les heures, et ainsi de suite.
  • Vous trouverez aussi des liens vers d’autres documents avec le travail de certaines équipes lors des différentes phases de l’atelier. Nous les avons utilisés pendant l’événement pour faire les débriefs collectifs.

Vous avez envie de faire l’atelier dans votre entreprise ou à un événement ? Allez-y ! Vous pouvez réutiliser ou adapter les contenus de cet article ainsi que notre support de présentation.

Et si vous avez besoin d’aide, n’hésitez pas à nous solliciter ! Nous serions ravis d’intervenir pour l’animation et plus. Prenez contact avec l’équipe Scrum Life via contact@scrumlife.tv ou bien les réseaux sociaux. Vous pouvez aussi contacter directement l’une des personnes derrière cet atelier – vous trouverez nos coordonnées en fin d’article avec toutes les ressources complémentaires.

Avant de partager nos apprentissages autour de cet atelier et de sa première animation, voici les éléments de contexte qui nous ont guidés dans sa conception.

Frug’Agile France 2020, c’est la 10ème édition d’Agile France avec plus de 40 conférenciers et 350 participants. Suite à la crise sanitaire, elle se déroula en ligne. Cette différence fut aussi l’occasion pour les organisateurs d’expérimenter avec un nouveau format : l’événement se déroula chaque soir de 18h à 23h du lundi 29 juin au vendredi 3 juillet.

C’est dans ce contexte que Scrum Life a été approché par les organisateurs de l’événement pour animer une soirée d’ateliers.

Logo Frug'Agile France

Scrum Life, c’est bien sûr Jean-Pierre Lambert et Constantin Guay qui animent chaque semaine une nouvelle vidéo qui parle de l’esprit agile. Mais c’est aussi toute une communauté très active. Une équipe s’est naturellement formée pour concevoir la soirée d’atelier et ensuite l’animer :

Marilyn Kol n’animera pas à proprement parler l’événement mais en fera la facilitation graphique.

L’atelier a été conçu pour respecter les contraintes imposées par l’organisation :

  • Au format de 4 heures avec une pause au milieu
  • Le soir
  • À distance

Le format long, à distance et le soir se sont cumulés pour nécessiter d’imposer un certain rythme pour garder les participants intéressés. Plutôt que de subir ces contraintes, nous les avons prises comme une opportunité : c’était l’occasion idéale d’expérimenter la conception d’un même produit, du début jusqu’à la fin. Nous ne voulions pas simplement dérouler une série d’ateliers indépendants, ce qui finalement n’aurait pas apporté beaucoup de valeur à la communauté : ç’aurait été du déjà fait et refait.

Pour l’animation à distance, l’organisation de l’événement avait choisi Remo. L’animation fut donc conçue pour fonctionner au mieux avec cet outil.

L’outil Remo a 2 modes :

  • Un mode atelier où les participants peuvent passer de table en table et échanger en audio/visio, utiliser un tableau blanc virtuel, partage d’écran, etc.
  • Un mode présentation où seuls certains participants – les animateurs – montent sur scène, alors que tous les autres participants sont spectateurs

Parmi les autres contraintes imposées par l’outil :

  • En mode atelier, pas plus de 6 personnes autour d’une table donnée. Il faut donc garder au moins une place libre pour que les animateurs puissent, eh bien, animer justement 😁
  • Il n’est pas possible de partager directement le tableau blanc virtuel d’une table avec une autre table, ou avec la scène une fois en mode présentation. Si on veut partager ainsi le travail d’une table, il faut donc prévoir de faire un export ou une copie d’écran puis par exemple partager son écran ou autre.
  • Les tableaux blancs virtuels sont persistants. Ils restent associés à une table et non pas aux personnes qui y figurent. Le fait de passer en mode présentation ne l’efface pas.

Cette dernière contrainte des tableaux blancs persistants nous servira bien. Elle permet justement aux équipes de travailler toute la soirée sur la même idée de produit. Elle nous permettra aussi de préparer les tableaux blancs avant le début de l’atelier en y plaçant des canevas et exemples. Cela facilitera la compréhension des consignes et permettra aux équipes de se mettre plus rapidement au travail.

Lors de Frug’Agile 2020 cet atelier a été très bien accueilli, comme vous pouvez le constater sur le roti.express de la session. Nous avons été agréablement surpris, au vu de la longueur de l’atelier, de voir que la grande majorité des participants (+85%) est restée du début à la fin de l’atelier.

Un exemple de feedback que nous avons reçu résume bien la pertinence de mettre ces 4 phases ensemble dans un atelier :

C'est fou à quel point un objectif de sprint bien fait facilite la création du backlog de sprint et aussi comment, grâce à la vision produit, définir des objectifs de sprint qui ont du sens est plus simple et naturel.

Nous en profitons d’ailleurs pour remercier les participants, le succès de la soirée est aussi et avant tout grâce à eux !

De notre côté nous avons fait notre propre rétrospective de l’événement, à chaud juste après avoir quitté Frug’Agile France.

Qu’avons-nous appris ?

  • Faire un exercice qui sensibilise les équipes à l’importance de la vision produit et des objectifs de sprint, c’est possible ! En général, les équipes l’apprennent sur le tas. Cela ouvre des perspectives intéressantes en tant que Scrum Master ou coach agile pour faire monter plus vite en compétence les équipes.
  • Les outils numériques ne remplacent pas les interactions physiques, mais il est bel et bien possible de faire des ateliers avancés à distance !
  • Nous ne sommes pas satisfaits de l’expérience que nous avons eue avec l’outil utilisé, Remo. En effet, l’expérience était aléatoire, avec divers bugs et des instabilités de connexion. Nous comprenons néanmoins qu’il n’a pas réellement d’équivalent aujourd’hui, et c’est pourquoi il est choisi par diverses conférences en ligne.
  • L’animation de plusieurs tables est très difficile à distance. Là où en physique on peut entendre à moitié et voir de loin ce qui se passe sur plusieurs tables, il est très difficile via l’outil numérique de surveiller plusieurs groupes pour détecter ceux qui ont besoin d’aide.
  • À l’inverse, avec le nombre réduit de participants (nous avions prévu large, dans le doute) nous nous sommes naturellement assignés chacun une table et l’avons suivi du début jusqu’à la fin. Cela s’est révélé une très bonne chose. Cela a permis à l’animateur de bien jouer son rôle, en s’imprégnant lui aussi de l’idée de produit sur laquelle travaille sa table.
  • Nous pensions naïvement que les participants pourraient aller et venir pendant l’événement. L’expérience nous a montré que non. C’est bien la continuité entre les différentes phases de travail qui crée une bonne expérience, en gardant en tête la vision produit du début jusqu’à la fin. Ce n’est pas vraiment un problème, dans le sens où c’est là-même la force de cet atelier. Il faut par contre bien le garder en tête : cet atelier ne se prête pas à des contextes où les participants changeraient en cours de route.
  • Les tables qui n’ont pas pu produire une vision produit suffisamment forte, claire et complète ont eu des difficultés sur les ateliers suivants. Cela confirme à quel point la définition du produit est bien le fil rouge de l’ensemble de l’atelier et l’importance de la vision produit tout au long de la construction d’un produit.

Est-ce que cet atelier n’est valable qu’en tant qu’exercice ? Ou bien peut-il être utilisé en situation réelle, sur un vrai produit avec l’équipe en charge de son développement ?

Oui ! C’est tout à fait possible. Constantin Guay a ainsi eu l’occasion de l’animer chez un de ses clients, dans le contexte d’un vrai produit : le sujet de l’exercice était réellement celui du client.

Déjà au bout de deux heures, l’équipe à pu faire émerger et s’accorder sur la vision produit et a effectué son User Story Mapping. Le Story Mapping a permis d’affiner et de faire évoluer la vision produit. Cela démontre bien que la vision produit est un travail de découverte itératif.

Si vous aussi, vous voulez utiliser cet atelier dans votre équipe ou votre organisation, n’hésitez pas à prendre contact avec nous pour vous aider. Ecrivez-nous par exemple à contact@scrumlife.tv.